Je vous propose d'inaugurer une nouvelle rubrique dans le blog : celle des récits de naissance. On en parlait samedi dernier ; on entend trop peu souvent des récits d'accouchement qui se sont bien passés. Une certaine pudeur oblige les femmes qui ont vécu de belles choses à les taire. Pourtant, les futurs parents ont besoin d'être rassurés ; la naissance est une aventure extraordinaire qui peut être belle et gratifiante à condition qu'on laisse à la Nature la possibilité de faire son travail !
N'hésitez pas à me faire parvenir vos récits de naissance (anonymes ou pas).
3
ans d'attente...c'est comme ça que l'on peut résumer le chemin
parcouru jusqu'à ce 15 Septembre 2011, jour de la naissance de notre
fille aînée.
Un
premier bébé qui s'envole en 2009 alors qu'on réfléchissait à
l'AAD (Accouchement à Domicile). Puis les examens, la PMA
(Procréation Médicalement Assistée), les piqûres.....la
programmation d'une IAC (Insémination Artificielle du Conjoint).
Finalement,
10 jours avant, j'apprends que je suis enceinte ! Et c'est un « bébé
couette » (sans aide médicale).
Début
de grossesse gâché par l'angoisse de perdre à nouveau ce petit
ange, on se dirige donc vers un suivi hyper médicalisé ainsi qu'un
projet de naissance à l’hôpital de Bayonne, niveau 3, ça
rassure...
Bébé
s'accroche, je commence à le sentir, ça me conforte, j'arrive mieux
à me projeter... Je souhaite une naissance moins dirigée par les
professionnels, être un maximum actrice, faire confiance à mon
instinct...Après tout, ma mère, ma grand-mère, etc....elles ont
toutes accouché sans péridurale !
SuperPapa
n'est plus si confiant envers la Nature et mettra deux bons mois à
comprendre mon point de vue et accepter de rencontrer M., une sage
femme libérale qui propose un accompagnement global (avant, pendant,
après) et surtout des naissances respectées.
6
mois de grossesse, nous tournons le dos à l’hôpital ! SuperPapa
et moi avons trouvé un compromis : nous tentons une naissance en
plateau technique à la clinique d'Orthez avec M. !
Nous
voilà le mercredi 14 Septembre 2011.
Pile
j'ai RDV chez l'esthéticienne ! J'ai dû le sentir en fait ! Je suis
très mal installée, je sens la petite bouger de façon différente,
je suis mal à l'aise...1h après ce RDV, le travail débutait ^^ !
Je
pense que la douleur de l'épilation et la mauvaise posture ont
décidé N. à sortir...!!!
Donc
il est 19h à peu près, 1ère contraction. Toutes les demi-heures.
A
20h on commence à noter la fréquence au cas où mais je suis zen,
persuadée que c'est un faux travail, je dis à P. que je prend deux
spasfon et un bain et qu'on pourra aller se coucher.
Les
contractions continuent toutes les 20min, le bain n'a pas fonctionné,
au contraire, mais bornée, je vais au lit, sûre que tout va
s'arrêter.
Au
bout de 2 contractions je squatte le salon, la douleur me fait gémir,
je dis à P. que je ne veux pas le réveiller car il se lève à 4h
du mat', toujours sûre qu'il va aller bosser ^^.
Je
comate, j'arrive à dormir entre 2 contractions, mais elles restent
là, toutes les 20min. Ça fait mal mais elles ne durent pas
longtemps (et ce jusqu'au bout, j'ai eu de la chance, je pense que ça
peut être pire).
A
minuit je m'énerve, je décide de prendre un bain encore plus chaud
pour clôturer cet épisode, je veux dormir et "rentabiliser"
ma journée du lendemain, pas question de faire la sieste à cause
d'un faux travail, non mais !
Je
vais y rester presque 3h...!!!!
Je
gémis de plus en plus fort mais j'imagine que ce sera pire en dehors
du bain. Les contractions passent à 10min, parfois moins.
Pas
du tout pressée d'appeler ma sage-femme, je commence à comprendre
que N. veut nous rencontrer aujourd'hui, mais on m'a tellement
rabâché qu'un 1er enfant met environ 24h à sortir...je veux faire
un max du boulot CHEZ MOI.
A
2h P. est réveillé par mes gémissements et ça tombe bien, j'ai
besoin de lui, ça fait 5h que je gère seule, maintenant que j'ai
accepté l'idée de la naissance imminente, je ne veux plus qu'il me
quitte.
A
2h40 je sors de l'eau et là : du sang.
Je
n'y étais pas préparée même si ma sage-femme nous en avait parlé;
pour moi le sang c'est mauvais signe, je m'attendais au bouchon
muqueux ou autre.
Du
coup je panique un peu et demande à P. d'appeler notre SF.
Elle
dit que c'est le col qui travaille, rien d'inquiétant mais qu'elle
arrive.
A
3h40 elle est là. Je suis sur le lit, en travers, arrivée là à 4
pattes, j'ai bobooooooooo !
En
un coup d'oeil elle sait que je n'en ai pas pour longtemps. Elle
m'examine et me dit que tout va bien, que c'est bien pour
aujourd'hui, qu'on s'en va. Je comprends que N. a bien bossé et
qu'il faut y aller. Je saurai plus tard que je suis dilatée à 4.
J'ai
faim, j'attrape un bout de pain, P. charge tout dans la voiture,
c'est irréel !! On met une serviette sur le siège au cas où : j'ai
commencé à perdre le bouchon muqueux. Une heure de route, je me
mets dans ma bulle, ça passe très vite du coup. Je gère mieux qu'à
la maison, je m'accroche où je peux. Interdiction de mettre la
radio, j'ai chaud puis froid, je dois sûrement être chiante pour le
conducteur!
Arrivés
à la clinique, je sens N. dans mon bassin, je pense ne pas pouvoir
marcher... P. propose de me porter mais je vais pas me la jouer comme
au cinéma hein ^^ Je me déplace en canard, purée il faut monter
les escaliers ! Sans dec', y'a pas un ascenseur ou une chaise
roulante ???!!!
On
arrive dans le service, pas un chat, tout est noir. Je ne verrai
personne et je suis la seule à accoucher ce soir là. On se
déchausse dans le couloir, la salle de naissance est un lieu de
"détente", façon de parler ^^
D'instinct
je me mets par terre, à genoux, les coudes appuyés sur le lit. Ma
sage-femme m'installe un matelas en mousse sous les genoux, je me
déshabille. Il fait bon, l'équipe a préparé la pièce, une lampe
de sel éclaire à peine, je suis presque mieux que chez moi, de
toute façon la présence de M. me rassure, je suis "sereine"
même si un peu flippée, ça reste mon 1er accouchement !!
M.
m'ausculte, je n'ai pas rêvé, N. avance vite, il est 5h, je suis à
6 (mais je ne le sais pas). Je m'allonge un peu sur le côté, M. me
plie la jambe du dessus. Elle a une lampe frontale, lumière rouge,
hors contexte ça me fait trop marrer ! Je n'aurai aucun monitoring
en continu, de temps en temps elle écoute le coeur de ma petite avec
un petit appareil au bout d'un fil. Elle respecte ma position,
s'arrange pour trouver le coeur (souvent elle passe par dessous le
ventre, entre mes jambes, pour me déranger le moins possible). P.
assure, il a compris qu'il ne faut SURTOUT pas me toucher ni me
parler pendant les contractions : je mord !! Il me masse, me
rafraîchit, me rassure... il fait le copilote de ma SF !
Je
suis maintenant à 4 pattes sur le lit, face au mur, une montagne de
coussins contre le dossier du lit. Je m'affale dessus entre les
contractions et me relève sur les genoux pour mieux gérer la
douleur. OUI j'ai mal ^^
M.
nous laisse à 2 reprises, elle va déjeuner avec ses collègues,
fumer... P. est là et elle voit que je "gère". J'avoue
que je suis moins tranquille quand elle part. Je me rallonge, je suis
à dilatation complête mais je n'ai toujours pas percé la poche des
eaux. Je travaille un peu comme ça, je n'ai toujours aucune notion
de ce qu'il se passe autour de moi, je vois juste que le jour se
lève, je suis déçue, je me sentais mieux dans l'esprit de la nuit,
la pénombre, l'intimité...
D'un
coup je panique, je sens que ça change, j'ai peur que N. sorte d'un
coup...j'ai vu trop de films lol ^^! Je dis à P. de sonner l'alarme,
je veux que M. revienne ! Elle accoure et me dit qu'elle ne me quitte
plus, que N. arrive. Je m'imagine 10 minutes, en fait il doit m'en
rester 40 "petites" !!
Je
demande si la position allongée est aussi rapide que "debout",
elle me dit que non... Je suis épuisée mais je préfère aller au
plus vite, je me remets face au mur, sur les genoux, cambrée les
fesses en arrière : Papa et M. sont aux premières loges ^^ D'un
coup je suis trempe : la poche des eaux est enfin percée ! Trop
bizarre, liquide chaud en grande quantité. M. m'essuie. Du coup elle
sent la tête ! Elle me demande si P. peut toucher, moi je suis
d'acc, mais faudrait que LUI veuille ! Un peu "spice" pour
le commun des mortels mais SuperPapa est à fond : "j'ai senti
ses cheveux chérie !" Trop ému, c'est mimi tout plein mais
j'en ai un peu rien à faire, je suis à l'ouest, concentrée sur ma
douleur... Parfois je respire trop vite, je m'excite un peu trop, M.
me calme, me dit de ralentir, de faire comme elle nous a appris. Ma
douleur me dit de l'envoyer bouler mais ma raison lui fait confiance,
je sais que je dois l'écouter. Elle me félicite, je suis une bonne
élève obéissante ^^ Plus tard elle me dira que j'ai vraiment
assuré, que j'ai travaillé en équipe (avec elle et avec ma fille :
je parlais souvent à N. "vas-y ma fille", "allez
N."...).
Je
n'y crois plus mais mon bébé continue de descendre, que c'est long
! Ils voient la tête, P. est au 7ème ciel ! J'ai envie de craquer,
ça me gave que eux soient à fond, je les imagine se faire un clin
d'oeil, lever le pouce, etc... J'ai mal MERDEEEEEE !!! A ce moment là
je suis perdue, ma fille ne fait que descendre et remonter, mon
périnée ne s'ouvre pas assez, je sens qu'il va craquer donc je
"ré-aspire" mon bébé pour ne pas me déchirer. Je
pensais à 3 poussées pour "l'éjecter" mais il m'en
faudra au moins 6 ou 7...j'en peux plus, je suis découragée...je me
dis que je n'accoucherai plus jamais sans péridurale, que je
programmerai une césarienne et autres conneries de la nana qui
douille comme jamais ! Je suis triste car ce genre d'accouchement ne
me correspond pas du tout, du coup je m'imagine adopter, ne plus
avoir d'enfant par voie naturelle... (on est bien d'accord que
"l'amnésie maternelle" a fonctionné sur moi aussi, on a
remis le couvert 13 petits mois après ^^ !).
Bref.
M. me dit de me faire confiance, que je ne vais pas me déchirer
gravement, que je peux y aller. J'y vais.....et je regrette aussitôt
lol ! Je suis au grand couronnement : le plus gros périmètre du
crâne de ma fille est dehors et ne re-rentre plus. Je hurle comme un
animal sauvage, c'est très rauque, ça vient de loin... M. va
rassurer ses collègues : je ne vais pas mourir, tout va "bien"
! Elles ont l'habitude et comprennent qu"'elle doit être
sur le périnée" !! Oui, oui, sur MON périnée !
SuperPapa
est toujours au top, aux premières loges..... M. le sent prêt et
lui propose de m'accoucher....rien que ça ! Il accepte bien
volontiers ! M. observe, reste à nos côtés, bienveillante.
Une
dernière poussée et notre premier enfant sort de mon
ventre.....pour atterrir directement dans les mains de Papa ! Quel
bonheur !
Je
leur tourne toujours le dos, N. pousse enfin un cri...elle va bien !
M. incite P. à me la passer sous les jambes. Elle est glissante mais
c'est « ma mienne », je l’attrape comme je peux et la
colle à moi....Il est 8h20, le travail aura été rapide pour un
premier !
M.
et P. changent les draps en 4ème vitesse, je m'allonge avec notre
trésor.....
Mais
ce n'est pas fini, il faut expulser le placenta...pffff ras le bol !
C'est assez rapide et la douleur est bien moindre quand on a la plus
belle des récompenses sur son sein ! J'ai quelques égratignures, M.
propose de me recoudre pour que ce soit plus joli. Pourquoi pas ?
Trois petits points sous anesthésie locale....je ne sens rien. J'ai
vraiment deux sage-femmes : M. qui recoud et P., son assistant, qui
m'injecte l'anesthésiant ! Quel homme ! Il m'aura époustouflée ce
jour-là SuperPapa !!!
N.
restera 3h en peau à peau sur Maman puis 2h sur son Papa......au
chaud. Pas de « soins » intrusifs et surtout inutiles, N.
n'a besoin que de téter et de câliner...en famille...nous sommes
3.....
Notre
second enfant arrivera dans 2 mois. M. nous accompagne à nouveau et
nous sommes ravis de prévoir cette autre naissance à Orthez ! Vive
le plateau technique ! Excellent compromis pour nous !